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Une nuit suffit à Gerald Genta pour concevoir la Royal Oak

Audemars Piguet et Royal Oak : le chef-d'œuvre conçu par Gérald Genta

Audemars Piguet Royal Oak (Source - Sotheby's)

Gérald Genta, un personnage aussi énigmatique qu'ingénieux : en 1972, la Royal Oak arrive sur le marché grâce à l'un des créateurs de montres les plus connus et les plus appréciés de tous les temps.

La ligne Royal Oak d’Audemars Piguet est sans aucun doute l’une des icônes de la haute horlogerie. En effet, elle est l’une des montres les plus célèbres de tous les temps et peut compter sur une réputation quasi légendaire. Dans ce qui suit, nous allons examiner en détail toutes les circonstances qui ont conduit à la création de la Royal Oak : de la première idée en 1970 au lancement officiel le 15 avril 1972.

Au début des années 1970, le marché occidental des montres de luxe, dominé par Rolex, est menacé par l’arrivée du quartz japonais. Les fabricants suisses devaient prendre des mesures drastiques pour se relancer dans le secteur et éviter le risque de se retrouver en retrait. À l’époque, Audemars Piguet est une marque plutôt conservatrice qui produit des montres en or traditionnelles, reconnues davantage pour la qualité de leur mouvement que pour leur design.

La Royal Oak "Jumbo" (Source - Sotheby's)

Les dirigeants d’Audemars Piguet ont vite compris qu’ils devaient faire quelque chose pour bouleverser le marché et renverser la tendance dans une période aussi complexe pour l’horlogerie. Il leur fallait un nouveau concept, une idée révolutionnaire : une montre au design inhabituel, à la fois sportive et élégante, à porter en toutes circonstances.

Le dirigeant d’Audemars Piguet a donc décidé de se tourner vers un designer ayant une longue histoire derrière lui, un professionnel emblématique et non conventionnel : Gérald Genta. À l’époque, Genta était déjà bien connu dans le secteur pour avoir conçu la Polerouter d’Universal Geneve, la Constellation d’Omega et la Golden Elipse de Patek Philippe. La légende veut que Genta ait conçu la Royal Oak en une seule nuit : ce premier projet avec AP (Audemars Piguet) allait devenir le chef-d’œuvre de sa carrière et l’une des icônes de l’histoire horlogère. Le résultat est une montre en acier, plutôt mince (seulement 7 mm) et plutôt grande pour l’époque (39 mm), avec un seul cadran décoré en bleu.

Gérald Genta : designer visionnaire qui a incarné l'esprit de "sa" Royal Oak à 360°.

Le génie de la nouvelle Royal Oak réside entièrement dans l’esprit de son concepteur Gérald Genta et consiste en sa propre vision de la montre. La Royal Oak rompt avec les conventions de l’époque : elle se présente avec un boîtier intégré dans un bracelet articulé contenant un mouvement, lui-même scellé, une lunette octogonale et 8 vis. À une époque où le culte de l’élégance dictait que les éléments techniques devaient être cachés autant que possible, Genta a astucieusement décidé de les montrer et de les rendre visibles. Dans un premier temps, ces choix n’ont pas été immédiatement appréciés par les experts en horlogerie, qui ont même crié au scandale. Évidemment, la plupart de ces personnes ont changé d’avis quelques années plus tard et ont même commencé à accorder à la Royal Oak une valeur culturelle.

Comme cela arrive souvent dans l’histoire de l’art, la Royal Oak n’a pas connu un succès immédiat. Les premiers prototypes ont été réalisés en or blanc et non en acier en raison de certaines difficultés logistiques et technologiques. Évidemment, avec un tel niveau de finition, le prix de vente de la montre a augmenté de façon spectaculaire pour atteindre environ 3 000 $ ; ce n’est que des années plus tard que les premiers modèles ont pu être vendus pour environ 1 000 $. Dans les années qui ont suivi, ce sont ses variantes qui ont fait de la Royal Oak une icône des montres sportives de luxe. La Royal Oak a évolué avec le temps et a été portée par des centaines de personnes célèbres : des musiciens aux acteurs, des sportifs aux entrepreneurs.

Gérald Genta, le designer qui a inventé la ligne Royal Oak (Source - AP Photo)

Pour les collectionneurs et les experts en la matière, même ceux qui ont sévèrement critiqué la nouvelle ligne AP à ses débuts, l’original de 1972 est devenu le véritable chef-d’œuvre de Gérald Genta. Ce garde-temps n’a pas réussi à sauver les entreprises suisses de l’avènement des modèles japonais des années 1970 comme le souhaitait la direction d’AP, mais a bouleversé durablement l’industrie horlogère. Avec l’arrivée de la Royal Oak sur le marché, l’industrie horlogère elle-même n’était plus ce qu’elle était auparavant, et tout s’est précipité en termes de conception, d’ingénierie et de production de montres.

Une icône pour les collectionneurs : la Royal Oak 1972 et le modèle personnel de Gérald Genta

La Royal Oak de Gérald Genta (Source - Sotheby's

Les premières montres Royal Oak de 1972 sont devenues des pièces très recherchées qui réapparaissent de temps à autre et sont vendues aux enchères pour des sommes très élevées avant de disparaître à nouveau et d’entrer dans des collections privées. Tout cela parce que les modèles en question sont une véritable page de l’histoire de l’horlogerie contemporaine, c’est-à-dire qu’ils peuvent être définis comme l’essence même et l’incarnation de ceux qui les ont conçus.

Mais si l’on parle de la Royal Oak personnelle de Gérald Genta, la question change complètement. Dix ans après sa mort, Evelyn Genta, sa veuve, a décidé de mettre en vente non seulement certaines des montres de son mari, mais aussi sa propre Royal Oak. La Royal Oak personnelle de Gérald Genta est donc une pièce unique d’une valeur inestimable, notamment parce qu’il l’a lui-même personalisée à sa guise. C’est précisément la raison pour laquelle la Royal Oak d’Audemars Piguet de Gérald Genta peut être décrite comme le Picasso des montres, car elle est objectivement bien plus qu’une simple pièce de collection.

Apparemment, il y avait huit enchérisseurs : quatre au téléphone, trois en ligne et un dans la salle. Les enchères ont atteint deux millions d’euros en un peu plus de six minutes, soit bien plus de quatre fois son estimation initiale. Produite vers 1978, cette Royal Oak spéciale réf. 5403 « Jumbo » en acier est la seule au monde à posséder une lunette en or jaune, ajoutée ultérieurement par Gérald Genta lui-même.

Gérald Genta (Source - Paris Match)

Au total, les pièces personnelles de Genta ont atteint plus de quatre millions d’euros aux enchères. Comme on peut le lire sur le site officiel d’Audemars Piguet, une partie de cette somme sera réutilisée par l’association Gérald Genta Heritage pour lancer la première édition du Prix Gérald Genta pour les jeunes talents du design.

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